vendredi 10 août 2012

Landmannalaugar - Skögar - jour 3

Þorsmörk-Skögar
C'est quand on pense qu'on en a quand même vu pas mal qu'on perd sa garde et qu'on s'ébaubit le plus. C'est par un beau jeudi matin ensoleillé donc, dans les 15° secs, à peine sorti du lit de la rivière Krossá, côté sud, encore sur le plat, mais en préparation mentale pour la dernière et plus intense des journées, 25km, 850m de montée et 1000m de descente, que cherchant mon chemin je tombe sur... un beagle qui passait par là. Pas un p'tit modèle de course tout nerveux, pas le modèle rond avec un trou dedans, plutôt un gros lourdeau mollo . Et pas un beagle islandais sauvage non plus, non madame, beagle en laisse avec au bout de la laisse, la famille élargie, l'air local. Je me dis qu'ils sont en ballade autour du camping cherchant le prochain stand à hot-dogs... non monsieur, après m'être informé directement à la source chaude, on parle ici d'une famille de relativement locaux crinqués pour une p'tite (!) ballade en montagne. Ah oui... détail non négligeable... madame, monsieur... l'ado blond, couette mauve, en unicycle! De montagne, mais quand même bien rien qu'une roue.
J'imagine la discussion...
"Órnald mon fils, tu n'as rien de prévu jeudi et il va faire un temps resplendissant, alors nous allons en profiter pour faire Þorsmörk- Skógar en famille.
- Ah non, pas encore. On l'a fait 'y a deux semaines.
- Oui, mais cette fois-ci il y a matante Giseldóttir et mononc' Janclödsson qui vont venir. Ils pensent même amener Bailounsson.
- Ben voyons Bailounsson!? On va passer la journée à le chercher. En tout cas, si je viens j'apporte ma PS3.
- Pas question.
- mon unicycle?
- ok mais tu mets ton casque.
- Rapport! Cass ou pas cass, si je tombe 500m plus bas, ça change quoi?
- Tu mets ton casque... et les jambières. Sinon fini la couette mauve et le percing au pancréas..."
Enfin, vous voyez le genre... et voilà qui part bien la dernière journée de rando, motivé de voir comment l'ado et le chien vont se débrouiller. Eh bien si ça avait pas été de Giseldóttir qui traînait de la patte, j'aurais jamais su parce que j'aurais jamais été capable de les suivre. L'ado et le beagle en avant tout le temps de la montée. L'unicycle servant seulement dans les bouts relativement plats et les descentes pas trop pentues (photo et vidéo à l'appui), à faire des aller-retours entre la famille et le chien.
Je pensais les avoir perdus pour de bon quand on est arrivés presqu'au sommet et que le temps s'est mis à pas mal moins resplendir sur l'autre versant. Brume, brouillard, bruine dans les babines (tellement qu'on voyait pas tout le temps le piquet suivant, et, je l'ai dit, c'est pas parce qu'il manque de piquets sur le sentier). Je les ai perdus aussi à cause du détour, ou plutôt du raccourci, dont personne m'avait parlé, surtout pas ma carte inutile payée à gros prix. Raccourci qui sauve un peu d'altitude et 2km, mais qui évite le sympathique refuge du sommet. Alors comme j'ai fait le détour par le refuge, j'en ai profité pour prendre le chai et la cliff bar en jasant avec Andrea, la sympathique Warden moins sexy que l'autre, mais beaucoup plus jasante.

Je les ai retrouvés beaucoup plus tard dans la descente, au moment où la matante a fait l'erreur de relâcher lousse Bailounsson... et ce qui devait arriver arriva, le beagle dans la brume de décoller à fond de train te ramasser 3 moutons défrisés que le hasard avait mal placés pas loin, mais qu'on n'aurait jamais vus si le chien avait pas décidé de leur donner la go de leur vie. Ça y est, on allait perdre le beagle à tout jamais, me suis-je songé. Quand il est réapparu 2 heures plus tard, tout content au bout de sa queue branlante et du chemin, beaucoup d'altitude avait été perdue, comme beaucoup de coups de sifflet dans le vide par Giseldóttir sacrant à Thor, à Týr, à Odin et à Loki (dieu fripon !?... et "père de plusieurs monstres; le serpent Jörmungand, le loup Fenrir, et la déesse du monde des morts Hel." C'est Wiki qui le dit... fascinante la mythologie nordique!).
Et je vous dis pas la face des 3 moutons ahuris, mais oh combien soulagés, qui reprenaient leur souffle plus bas dans la trail... le sprint d'une vie.
Je vous déblatère tout ça en fait parce que le si magnifique paysage côté mer, le col Fimmvörðuháls, entre les glaciers Eyjafjallajökull (lieu du fameux volcan pas prononçable qui nous a empoussiéré l'atmosphère en 2010, 6000 vols annulés, +1 milliard $ en perte pour les compagnies aériennes... et blaðlaþlá) et Mýrdalsjökull, la fantastique vue le long du chemin sur la rivière Skógá, "parsemée d'innombrables chutes d'eaux toutes impressionnantes et magnifiques" encaissées fabuleusement dans des canyons vertigineux, eh ben de tout ça, je n'ai malheureusement rien vu. Entendu les chutes, oui, entre 2 coups de sifflet, mais rien vu. Que du gris mouilleux. Avoir été météomedium, j'aurais fait la rando en 4 jours (plus sage) et campé en haut au refuge en attendant le beau ciel bleu du lendemain. M'enfin, vu malgré tout le dernier bond de la rivière avant la mer... la spectaculaire Skógáfoss, Skógá signifiant « forêt » (!?), et foss signifiant « la chute d'eau », 62 m de haut par 25m de large et assez profonde pour y oublier son coffre (patience, l'explication s'en vient...). La chute serait une des plus célèbres et des plus visitées du pays. J'ai vu ça au camping en bas! Tout en promiscuité, on est loin des baies isolées et sauvages des fjords de l'ouest. Si les voisins avaient pu monter leur tente dans mon vestibule, c'est sûr qu'ils l'auraient fait, ils étaient bien partis pour ça en tout cas.

Encore wiki, pour notre plus grand bonheur... "On raconte qu'un coffre se trouverait derrière la cascade (!), déposé ici par le Viking Þrasi Þórólfsson (vous vous arrangez avec les thÞ). Un enfant trouva le coffre quelques années plus tard, mais ne put en prendre qu'une poignée qui est aujourd'hui entreposée au musée de Skógar." J'ai vu ni le coffre, ni le viking, ni l'enfant, ni la poignée mais je vous avais bien dit qu'ils font des musées de n'importe quoi... manquerait juste un unicycle et un squelette de beagle perdu.
Chouette chute tout de même.

Pour ceux qui se poseraient la question... oui j'ai enfin pris une douche au camping. Elle était bouillante, pas d'eau froide, et m'a coûtée $2,50. Le camping était $9. Comme d'habitude.

Après la nuit de promiscuité, décidé de laisser le bus filer à 8h et de revenir sur le pouce. Ça s'est idéalement bien passé: pouce 1: kid norvégo-brésilien aux études en Islande et s'en allant prendre le bateau pour les îles Westman, lieu du plus gros party de l'année en Islande, avec des bands et de la boésson pendant 3 jours. Pouce 2: 2 pêcheurs des îles Westman s'en allant en ville pendant que le plus gros party de l'année en Islande se déroule sur leur île, avec des bands et de la boésson pendant 3 jours. Ils m'ont payé du café gratuit au truckstop et laissé direct au camping de Reykjavik. On a parlé d'immigration, de criminalité, ou l'inverse, c'est pareil pour les Islandais de toute façon, et de pleins d'autres sujets fascinants comme le bel été en cours et le mauvais temps ailleurs en Europe. Merveilleux, le pouce en voyage!

2 commentaires:

  1. belle prose, mon beagel ! Ca rappelle le canal de beagel justement ces photos brumeuses...

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  2. T'as du talent avec les mots et les images, monsieur KE!
    Bertrand

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